Opinions et attentes des cadres en France

[Options 653 – Janvier 2020 – p12-13]

Lucides et mécontent.e.s, leur présent est peu enviable au sein des entreprises et leur avenir est incertain. La défiance est là.

Le dernier baromètre Ugict-CGT/SECAFI, réalisé en octobre 2019 par l’institut de sondages VIAVOICE*, sur les opinions et attentes des cadres, ne brille pas par son optimisme. Les éléments présentés ne diffèrent pas fondamentalement des constats et des observations de l’Ufict Mines-Energie égrenés dans ces pages au fil des numéros, qu’il s’agisse de la situation des managers de proximité à Enedis, de celle des cadres soumis au forfait jours à EDF, des éléments obtenus via les baromètres sociaux d’entreprise que sont “Engie and Me” et “My EDF”.

Equilibrer vie privée/vie professionnelle constitue une aspiration première pour les cadres alors même que 59 % d’entre eux.elles déclarent travailler le samedi et/ou le dimanche et/ou durant leurs vacances. Les organisations de travail actuelles et les formes de management adoptées (holacratie, lean, méthode agile…) empiètent sur les temps de repos de certain.e.s. Qui n’a pas préparé de réunion ou de communication un week-end ? Qui n’a pas consulté ses mails entre Noël et le jour de l’an pour connaître les résultats d’une consultation ou l’avis d’un client sur un projet… ? 60 % des cadres souhaitent pouvoir disposer d’un droit effectif à la déconnexion afin de préserver leur vie privée et leur santé. Cette revendication portée par l’Ugict-CGT, en constante progression parmi les cadres depuis son lancement en 2014, gagne trois points entre 2018 et 2019.

Un temps de travail qui explose

Pour 65 % des cadres interrogé.e.s, la charge de travail augmente par rapport à 2018 ; corollaire, pour 54 % d’entre eux, c’est le temps passé au travail qui n’en finit pas de gonfler. Près d’un cadre sur deux travaille plus de quarante-cinq heures hebdomadaires et 23 % déclarent travailler plus de quarante-neuf heures. Le forfait-jour, dispositif en vigueur à EDF et dans d’autres entreprises de la branche, concerne plus d’un cadre sur deux et participe à ces durées de travail excessives. Les trente-cinq heures par semaine sont bien loin, de même que le respect du Code du travail qui prévoit un plafond à quarante-huit heures hebdomadaires travaillées, sans dépasser quarante-quatre heures sur douze semaines.

72 % des cadres ne se sentent pas associé.e.s aux choix de leur direction ; 53 % d’entre eux considèrent même que leur éthique professionnelle entre en contradiction avec les choix et les pratiques réelles de leur entreprise ou de leur administration. Pour 58 % d’entre eux.elles, l’évaluation individuelle manque de transparence, et un nombre encore plus important (62 %) estime qu’elle n’est pas fondée sur de bons critères. Dans ce contexte, doit-on s’étonner que la majorité des cadres souhaite prioriser le contenu et le sens de son travail ? Le droit d’alerte que revendique l’Ugict-CGT, qui permettrait de refuser la mise en œuvre d’une directive contraire à l’éthique, recueille 63 % d’avis favorables, soit un gain de quatre points comparé au baromètre 2018.

Pas de reconnaissance salariale

A l’heure où le gouvernement Macron organise le partage de la pénurie entre les différentes composantes du salariat, afin de toujours plus exonérer les revenus du capital, les cadres considèrent à 73 % qu’il n’y aura pas de maintien du niveau de leurs droits à la retraite. Ils sont 59 % à penser que reconnaissance salariale et déroulement de carrière ne seront pas au rendez-vous et 54 % pour qui l’assurance chômage ne permettra pas de maintenir le niveau de leurs droits.

* sondage réalisé entre le 6 et le 13 septembre 2019 sur un échantillon de 1 000 cadres interrogés en ligne. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas appliquée à cinq critères : sexe, âge, profession, région et secteur d’activité.

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