Le mouvement des « gilets jaunes » à l’automne-hiver 2018 a révélé une capacité d’initiative insoupçonnée chez des citoyen.ne.s que l’on disait résigné·e·s et passifs·ves. Sans chercher à imiter un mouvement social qui a développé sa propre dynamique, sans organisation constituée et en dehors du monde de l’entreprise, nous pouvons y puiser espoir et enseignement en matière d’engagement individuel et collectif.
Commençons peut-être par nous remémorer notre propre passé, par repartir du congrès du Cap d’Agde en 2015 lors duquel nous avons lancé d’importantes pistes de travail pour modifier en profondeur nos pratiques syndicales, notamment en plaçant les questions du travail au cœur de notre action. Lors de ce congrès nous avons également affirmé l’ambition de nous appuyer sur un nombre plus important de syndiqué·e·s, avec ou sans mandat IRP, ceux et celles que nous avons appelé les « syndiqué·e·s relais ». Nous avons aussi décidé d’appliquer à notre propre organisation ce que nous revendiquons dans les entreprises concernant la place des femmes et les conditions à créer pour une juste représentation dans le domaine des responsabilités syndicales.
Notre bilan met en évidence les différentes campagnes lancées depuis afin de mettre en œuvre ces orientations, mais il met aussi en évidence les limites rencontrées pour déployer pleinement nos initiatives et pour atteindre nos objectifs. La principale difficulté à laquelle nous nous confrontons, c’est notre capacité à déployer en profondeur nos initiatives au sein des entreprises, d’une part ; et d’autre part, à apporter des suites concrètes aux salarié·e·s concerné·e·s. Force est de constater que ces initiatives restent encore portées par quelques militant·e·s seulement, sans que nos syndiqué·e·s deviennent vraiment partie prenante.
Les mobilisations engagées par la CGT depuis 2017, pour contrer les offensives du gouvernement et des employeurs en matière de droit du travail et pour la défense des services publics, ont également révélé nos limites. Ces actions de longue durée, menées avec détermination par les salarié·e·s de certains secteurs, se sont heurtées à un trop faible élargissement dans l’ensemble des personnels et notamment auprès de l’encadrement et de la maîtrise. Les salarié·e·s de nos catégories se sont mal retrouvé·e·s dans les formes d’actions utilisées et, le plus souvent, n’ont pas pu s’exprimer.
La plupart de nos adhérent.e.s Ufict n’ont pas été en mesure de relayer autour d’eux·elles les différents appels à l’action, partageant eux.elles-mêmes l’état d’esprit de leurs collègues. Ce congrès doit en analyser les raisons et ce constat nous rappelle que nous avons besoin d’une CGT constituée de syndiqué.e.s acteur.trice.s et en prise avec le travail.
Nous nous fixons comme principal objectif de leur donner une place nouvelle dans les décisions et dans notre vie syndicale. Le renforcement de leur nombre est aussi l’une des conditions de modification durable des rapports de force au sein des entreprises. Notre Ufict a aussi la responsabilité de redéployer la CGT là où elle n’est plus présente et de l’ancrer partout où il est possible de le faire.
Des syndiqués « auteur·e·s, acteur·trice·s et décideur·es·s », constituent un objectif que la CGT se fixe depuis de longues années, mais qui ne se décrète pas. Il faut en créer les conditions et en comprendre les obstacles. Certains sont liés à des facteurs qui ne dépendent pas uniquement de nous : tendances à la délégation de pouvoir de la part des salarié·e·s ; transformations des entreprises avec l’explosion du numérique et son utilisation pour transformer les modes de management ; éloignement des Institutions représentatives du personnel (IRP) ; perte de confiance dans les grandes organisations collectives…
D’autres obstacles concernent notre capacité d’adaptation aux salarié·e·s et à leur vie au travail.
Nous pouvons modifier nos perceptions en réunissant au moins quatre conditions :
- Mesurer la situation de notre organisation, son implantation au regard de celle des entreprises, ses forces et ses faiblesses. Sachons nous fixer des priorités pour développer la syndicalisation là où sont les salarié·e·s.
- Mesurer aussi l’audience de la CGT et de son Ufict par une analyse fine des élections professionnelles sur chaque site. L’absence croissante de candidat·e·s CGT dans le troisième collège pèse désormais de manière significative sur l’ensemble des résultats de la CGT. Un état de fait qui rend d’autant plus urgent la présence et l’implication de nombreux·ses syndiqué·e·s cadres au sein de notre organisation.
- Examiner également notre fonctionnement dans son ensemble : de la section syndicale au bureau national, nos modes d’organisation et d’animation syndicale peuvent-ils répondre aux objectifs impartis ?
- Développer notre activité syndicale à partir du travail et des conditions dans lesquelles les Ingénieur·e·s, Cadres et Technicien·ne·s l’exercent en leur donnant la parole.
Ce document et les projets de résolution soumis aux amendements nourriront nos débats sur toutes ces questions et permettront de déboucher sur des décisions ambitieuses pour notre Union Fédérale.
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