Egalité professionnelle Entre aspirations et réalités : un lent et long voyage…

     

L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes en France est un principe fondamental visant à garantir que les femmes et les hommes, au travail, bénéficient des mêmes opportunités, conditions de travail, rémunérations et perspectives de carrière. Cela repose sur la conviction que le genre ne devrait pas être un facteur de discrimination.

L’éga pro est multidimensionnelle, car elle impacte aussi bien la société dans son ensemble, que les entreprises ou l’économie globale. C’est par ailleurs un élément fondamental de la justice sociale, car l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est aussi un facteur important de la pauvreté et des inégalités. Réduire cet écart améliorerait le niveau de vie des femmes et de leurs familles.

L’égalité professionnelle est aussi un levier pour changer les mentalités et les stéréotypes sexistes, et ainsi promouvoir une société plus inclusive. Dans les entreprises, l’égalité professionnelle ouvre la voie à une diversité des talents et des perspectives, afin d’exploiter pleinement le potentiel de l’ensemble des travailleur.ses, favorisant ainsi l’innovation, la créativité et la performance.

Toutes les sociétés qui s’engagent dans cette voie bénéficient souvent d’une meilleure image de marque et d’une attractivité accrue sur le marché du travail. Enfin, sur le plan économique, l’égalité professionnelle contribue au développement économique du pays. En favorisant une meilleure répartition des revenus entre les hommes et les femmes, elle stimule la consommation et réduit les inégalités.

Pourtant, en dépit de toute cette liste d’impacts positifs, malgré des avancées législatives, les défis persistent toujours. Ecarts de salaire, plafonds de verre, accès inégal aux postes à responsabilités,
conciliation entre vie professionnelle et vie privée, formation… demeurent des obstacles significatifs. Dans ce dossier Options nous passons en revue les principaux obstacles qui freinent cette progression vers une société plus juste et égalitaire.

L’écart salarial entre les hommes et les femmes

             Une réalité encore tenace en

France pour un bilan

loin d’être glorieux

En 2021, les femmes salariées du secteur privé gagnent en moyenne 24 % de moins que les hommes, tous temps de travail confondus : une différence de près de 400 €/mois, au détriment des travailleuses (calcul réalisé à partir du salaire moyen mensuel des hommes – chiffres INSEE – après déduction de 24 % d’écart de salaire moyen). Cette disparité s’explique principalement par des différences dans le volume annuel de travail.

Car les femmes sont davantage à temps partiel et donc sont moins présentes au travail au cours de l’année. En moyenne, le volume de travail des femmes est inférieur de 10,6 % à celui des hommes. Cependant, même à temps de travail identique, le salaire moyen des femmes resterait inférieur de 15 % à celui des hommes et cet écart grimperait même à 17 % selon le calcul utilisé par l’Observatoire des inégalités.

Dans le privé, les femmes gagnent 24 % de moins que les hommes

            Femmes dirigeantes :

des progrès en trompe-l’œil !

Malgré une augmentation notable du nombre de femmes à des postes de responsabilité ces dernières années, la parité dans les instances dirigeantes des entreprises françaises reste un mirage. Les femmes n’occupent aujourd’hui que 6,25 % des 80 postes de Directeurs Généraux ou Présidents des entreprises du CAC 40. Seulement 3 sont directrices générales, 2 sont présidentes de conseil d’administration, mais aucune n’est PDG. Selon le dernier Observatoire SKEMA sur la féminisation des entreprises, il n’y a que 16 entreprises du CAC 40 dont le taux de féminisation de leur comité exécutif (COMEX) est supérieur à 30 %. En moyenne, 25,7 % de femmes sont présentes dans les COMEX du CAC40 alors qu’elles représentent 37,1 % de la population cadres, vivier de recrutement des dirigeants. Le plafond de verre est donc loin d’être percé malgré quelques améliorations. 8 /Options n° 692 Mars 2024

26 % de femmes sont présentes dans les COMEX du CAC40 alors qu’elles représentent 37 % des cadres

Au périmètre des IEG, si EDF n’a que 29 % de femmes au sein de son COMEX, toutes les grandes entreprises affichent un taux supérieur à 30 %, bien que les femmes ne représentent qu’un peu moins du tiers de l’effectif de la Branche. Le COMEX d’ENGIE compte 44 % de femmes. Un plafond de verre qui entrave toujours leur progression de carrière Alors que leurs qualifications sont supérieures à celles des hommes, les femmes dans les postes d’encadrement font face à des disparités salariales injustifiables. En moyenne, à temps plein équivalent, les femmes cadres ont un sa- laire inférieur de 20 % à celui des hommes cadres (Agirc-Arrco, 2023). Alors qu’elles sont plus qualifiées qu’eux, elles accèdent plus difficilement au statut cadre que leurs homologues masculins. Et lorsqu’elles y parviennent, c’est majoritairement dans les professions les moins bien rémunérées (soins, ressources humaines et secteur tertiaire en général).

A temps plein équivalent, les femmes cadres ont un salaire 20 % inférieur à celui des hommes

Du fait de la maternité, les femmes qualifiées connaissent des périodes de rupture dans leur parcours professionnel. La moitié des femmes cadres jugent que le retour de congé maternité est difficile, en particulier parce que les employeurs refusent d’ajuster leur charge de travail. La culture du présentéisme imposée à l’encadrement, l’intensification du travail et les modes de émunération – et de promotionn– individualisés, sont incompatibles avec une vie familiale équitablement partagée entre les deux parents. Ainsi, les femmes se voient souvent contraintes de choisir entre leurccarrière et leur rôle de mère.

L’égalité des genres au travail victime des stéréotypes

Dans le monde professionnel d’aujourd’hui, les questions de genre restent toujours au cœur des débats sur l’équité et la justice sociale. Les stéréotypes de genre sont des croyances généralisées sur ce que les hommes et les femmes peuvent ou doivent faire. Malgré des avancées significatives dans de nombreux secteurs, ces stéréotypes continuent d’exercer une influence prépondérante, façonnant les opportunités et les expériences des individus sur leur lieu de travail. Ces préjugés, souvent inconscients, influencent les décisions prises en matière de recrutement, de formation et de promotion, et créent des disparités entre les femmes et les hommes. Au travail, ces idées reçues se traduisent souvent par des attentes différenciées selon le sexe, influençant la répartition
des rôles, les décisions d’embauches et les évaluations de la performance. Les femmes, par exemple, sont fréquemment perçues comme étant moins aptes à occuper des postes de leadership, ou à travailler dans des domaines techniquement exigeants, tandis que les hommes peuvent se voir dénier l’accès à des secteurs jugés féminins, comme la petite enfance ou le soin aux personnes âgées.

Selon l’INSEE, les femmes pourtant plus diplômées (53 %) que les hommes, s’orientent moins vers les filières scientifiques, à l’exception des études de santé. Sur la période 2020-2021, 71 % des inscrits dans les formations d’ingé- nieurs étaient des hommes.

Dans les IEG, 18 % de femmes sont recrutées dans la filière technique et 65 % dans la filière commerciale

   

Les industries électriques et gazières ne font pas exception à cette répartition liée au genre. Les femmes, qui ne représentent qu’un tiers de l’effectif de la Branche, sont majoritaires dans les filières commerciales et tertiaires mais très peu présentes dans les filières techniques. En 2020, elles ne représentaient que 18,3 % des recrutements dans la filière technique, pour un taux de 65,2 % dans la filière commerciale. L’accord, signé en juillet 2019, sur la mixité des métiers, constitue un des piliers de la politique d’égalité professionnelle. Mais toutes les entreprises de la Branche ont fort
à faire pour inverser cette tendance, car le taux de féminisation continue de croître beaucoup plus rapidement dans les filières ou elles sont déjà sur-représentées. La tendance ne semble donc pas prête de s’inverser…

La parentalité, un des facteurs aggravant des inégalités

Concilier vie professionnelle et vie privée est un enjeu majeur pour les deux parents, et plus particulièrement encore pour les mères. Car en France, ce sont les femmes qui assument toujours majoritairement les tâches domestiques et la garde des enfants. Cela les amène à réduire leur temps de travail (3 fois plus de temps partiel chez les femmes), à refuser des opportunités professionnelles, ou à se tourner vers des emplois moins exigeants. Les stéréotypes liés à la maternité, tels que l’idée que les femmes seraient moins investies dans leur travail après la naissance d’un enfant, pèsent lourdement sur leur évolution professionnelle. En 2018, d’après une enquête réalisée par le conseil supérieur de l’égalité professionnelle, 84 % des Françaises considéraient que la maternité avait un impact négatif sur leur carrière. Une réalité confirmée par une étude INSEE de 2020 qui montre que chez les ouvrières, celles ayant des responsabilités familiales ne sont que 54 % à être en emploi, tandis que celles n’ayant pas d’enfant à charge sont 74 % à travailler. En outre, pour les femmes cadres, une naissance implique une modification dans l’organisation de leur travail. Ainsi, 41 % des femmes cadres déclarent avoir réduit leur temps de travail ou modifié leurs horaires pour s’occuper de leurs enfants. Enfin, les congés parentaux sont très majoritairement pris par des femmes. En 2020, 90 % des demandes de congés parentaux dans les grandes entreprises de la Branche des IEG, ont été octroyés à des femmes. Plus les femmes occupent un emploi qualifié, plus elles estiment qu’être parent a des conséquences sur leur travail. Ce phénomène est général dans les pays développés où la maternité explique 80 % de l’écart entre la participation masculine et féminine au marché du travail.

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