Utiliser le bon langage, c’est redonner corps au réel
Face à la novlangue qui lisse, qui dépolitise, qui anesthésie la pensée, une langue de résistance persiste : rugueuse, dense, vivante. Celle qui affiche au grand jour les conflits, les colères, les espoirs… celle qui ne s’efface pas complètement et qui revient, encore et toujours, dans les luttes, dans les textes, dans les voix.
Une langue de résistance affiche au grand jour colères, conflits, espoirs
Voici un lexique de quelques mots de cette langue de résistance que la novlangue évite, travestit ou ridiculise pour imposer une pensée formatée, mais qui sont nécessaires pour penser un autre monde… La lutte est un « engagement collectif pour défendre ou conquérir des droits ». La novlangue l’appelle « dialogue social » ou « concertation ». Car dire « lutte », ce serait reconnaître un conflit constructif… autant dire une pathologie dans la novlangue !
Quant à la grève, la novlangue la stigmatise en « en perturbations », « prise en otage des usagers ». C’est réalité un retrait volontaire du travail comme un acte politique et solidaire. La grève n’est en rien anomalie : c’est un droit afin d’être entendu !
La grève est un droit, pas une anomalie : la novlangue la stigmatise
Solidarité : « confrontés à Lien actif, horizontal, entre égaux l’injustice la novlangue la mettent ». Les au rang gestionnaires, alors qu’elle suppose en déformations de d’un outil de premier lieu un engagement, et non une forme de pitié institutionnelle.
La justice sociale, tant entendue actuellement, exige une répartition équitable des richesses, mais aussi des droits et des protections. Or, dans le concept novlangue, elle induit des concepts qui ne feront jamais société, paix ou cohésion comme le mérite individuel.
L’utopie, un terme cher à celles et ceux qui luttent. Elle est transformatrice et imagine une autre politique, une autre façon de « faire société ». Mais la novlangue la qualifie « d’irréaliste » et/ou « d’idéologique », voire de ringarde, pour nous faire croire que rien n’est possible. Or l’utopie a toujours été, tout au long de l’histoire, un laboratoire avant de devenir réalité.
Les syndicats sont des outils pour organiser la défense individuelle et collective des salariés. En novlangue ils deviennent des « corps intermédiaires » ou des « partenaires sociaux » pour nous dérouter du vrai sens. Le syndicat se trouve ainsi disqualifié de sa fonction initiale, souvent traité d’archaïque, car il dérange… une preuve s’il en fallait qu’il reste bien, toujours et encore, utile.
Reprendre langue, reprendre souffle
La novlangue étouffe la pensée critique en remplaçant, en émoussant sans censurer vraiment… Une langue de résistance rend tranchant ce que la gestion tente de dissoudre. Elle réveille la mémoire des luttes, des fractures, ouvre des perspectives.
Ce lexique n’est pas figé : il est à enrichir, à transmettre. Se laisser submerger par la novlangue, ce serait ne pas être conscient de la propagande qu’elle diffuse. Mais reprendre le langage, c’est déjà reprendre le pouvoir…