32h sur 4 jours, économiquement c’est possible – Bilan des 35 heures

On entend parfois que notre pays n’a pas les moyens économiques de réduire le temps de travail… Chassons les idées reçues !

Bilan des 35 heures

Le journal « Le Monde » du 24 juin 2005 reprenait les conclusions de la revue de l’Insee “Economie et statistique” (une revue que l’on ne peut pas taxer de partisane) pour dresser un bilan de l’application des lois sur les 35 heures.

Le processus de réduction du temps de travail (RTT) “a conduit (…) à un rapide enrichissement de la croissance en emplois de près de 350 000 postes sur la période 1998-2002, et ceci sans déséquilibre financier apparent pour les entreprises”, écrivent les auteurs de cette étude. Ils estiment que ce résultat a été obtenu grâce à la recherche d’un “équilibre entre baisse de la durée du travail, modération salariale, gains de productivité et aide de l’Etat”.

Selon eux, 40 % des 350 000 emplois ainsi créés ont été “induits par les dispositifs incitatifs” qui ont accompagné la mise en place de la semaine de 35 heures. Ils prenaient ainsi le contrepied de l’un des arguments de la droite parlementaire, selon lequel les lois Aubry sur les 35 heures seraient un frein à la croissance et à l’emploi en France.

Les auteurs estiment toutefois que la baisse de la durée du travail, du fait de la mise en placedes 35 heures, a été “globalement” et en moyenne de moindre ampleur sur l’emploi que ne le laissaient supposer les études préalables. Avant 1998, les experts tablaient sur la création de 600 000 à 700 000 emplois. Seuls 350 000 ont été créés. Pourquoi cette différence ? “Le temps de travaildevait baisser de 10 %, relève l’étude. En réalité, les entreprises ont rarement réalisé cet objectif, grâce à des astuces comme celle qui a consisté à intégrer des jours de congés existants dans les RTT ou en ne payant plus les temps d’habillage.” Selon un indicateur de la direction de l’animation et de la recherche des études et des statistiques (Dares) du ministère de l’Emploi, la baisse de la durée du travail imputable à la RTT serait ainsi “d’un peu moins de 5 %” sur la même période.

Cent ans après la loi de l’Assemblée Nationale pour la journée de 8 heures du 23 avril 1919, nous sommes aujourd’hui à un nouveau moment charnière de l’histoire du travail. La France recensait 5,7 millions de chômeurs inscrits à Pôle emploi (catégories A, B et C) en décembre 2020, sans compter ceux qui ne sont pas inscrits à Pôle emploi, par radiation, par découragement, et qui sont évalués à 1,5million par l’Insee. La montée du chômage et de la précarité des dernières années s’est pourtantproduite dans un contexte d’avancées et d’innovations technologiques sans précédent.

 

Productivité et lutte contre le chômage

En quarante ans, la France a doublé sa richesse (courbe du PIB en rouge ci-dessous), mais lenombre total d’heures travaillées par la population active est resté pratiquement stable (courbes jaune et bleu), ce qui conduit bien sûr à une augmentation continue et plus forte de laproductivité horaire (en vert dans le graphique).

Avec une augmentation de plus de 25 % de la population active et une faible réduction du temps detravail, le chômage est inévitable !

Au final les 35 heures ont bénéficiéaux entreprises, et ce via deux biais : lamodération salariale et l’augmentationdes gains de productivité. La RTT “acontribué à la modération des évolutionssalariales”, estiment les auteurs del’étude, selon qui la moitié des salariéspassés aux 35 heures en 2000 ont ainsisubi une période de modération ou de gelsalarial “de l’ordre de deux ans”.

Les gains de productivité réalisés grâceaux 35 heures ont également été supérieurs à ce qui était escompté : “Les gains de productivité apparentés autravail ont été de l’ordre de 40 à 50 % de la baisse de la durée du travail, au lieu d’un tiers dans les travaux ex ante“, lit-ondans l’étude.

A ce jour, gains de productivité,modération salariale et allègements decotisations sociales auraient permis demaintenir la compétitivité des entreprisesà 35 heures“, écrivent ses auteurs.

 

Redisons le… : 32h, c’est économiquement possible !