TotalEnergies au banc de la société ?

Edito

Profiteurs de guerre, profiteurs de crise, parasites, … depuis le début de la guerre ukrainienne, les noms d’oiseau fusent en direction du groupe TotalEnergies. 

Alors que les prix à la pompe ne cessent de s’envoler, qu’une part croissante de la population pâtit durement du renchérissement des biens de première nécessité  et des coûts de transport, l’annonce mécanique,  un trimestre après l’autre, des profits incommensurables générés par TotalEnergies ne fait que favoriser l’érection d’un mur d’incompréhension et de désapprobation entre le groupe et ses dirigeants, et la société française.

Comment justifier  le décalage entre le vécu des citoyens, leurs difficultés au quotidien, et l’opulence tranquille du groupe,  toute tournée  vers la satisfaction de l’actionnariat ? La redistribution des richesses est au cœur du questionnement. Pas seulement envers les salariés du groupe, mais aussi  en direction de la société toute entière.  TotalEnergies ne peut pas rester hors-sol.

 

 «Ça ne doit pas être évident de travailler pour Total en ce moment ? »

 

Qui n’a pas entendu cette phrase, au détour d’une conversation ? Non, ce n’est pas facile, coincés que nous sommes, salariés du groupe, entre l’attachement à notre travail, les liens tissés tout au long d’une carrière, et le regard porté sur nous dès qu’il s’agit d’évoquer notre employeur. Cette schizophrénie n’est pas nouvelle, mais elle se trouve accentuée par la crise actuelle.

De son côté, la direction de TotalEnergies promène son satisfecit de tribune en plateforme médiatique. Car voyez-vous, tout cette manne va être réinvestie pour sauver la planète. Quant à l’opinion publique, elle ne pourrait pas se retourner contre le groupe puisqu’elle achète de l’énergie tous les jours ! Il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.

 

Les actionnaires font le plein

Les bénéfices du premier semestre 2022 devraient laisser les commentateurs économiques à court de superlatifs pour les qualifier.

La CGT a pris les devants en appelant le 24 juin dernier à la grève –bien suivie–dans tous ses sites français, pour demander l’ouverture de négociations sur les salaires, sans attendre les négociations annuelles obligatoires de fin d’année. De nombreux salariés du groupe subissent de plein fouet la crise actuelle, que ça soit dans les raffineries, dans les centres techniques ou au siège. Là encore, la direction fait la sourde oreille…

Le groupe n’a jamais fait de mystère sur sa disposition à assurer les revenus de ses actionnaires en premier lieu. Même quand il demandait des efforts à ses salariés lors des années de vaches maigres ou lors de la crise sanitaire, les dividendes ont été maintenus à niveau, quitte à endetter le groupe.

 

De super-green à super-méchant

Mais là, c’est de la dette envers la société dont il est question. Et elle s’allonge dans des proportions dont la direction du groupe ne semble (veut?) pas prendre conscience. 

La dette climatique, tout d’abord, alimentée par des décennies de tout carbone. Le virage écolo-bobo de TotalEnergies ne trompe pas : il s’agit-là surtout de capter les fonds publics des secteurs«verts» pour les transformer en bénéfices privés. Au temps pour l’autofinancement et la vision éclairée du groupe.

La dette sociétale ensuite : au petit jeu de «ce n’est pas moi qui fait le prix du pétrole, c’est le marché», le groupe TotalEnergies produit une énergie bientôt inaccessible au plus grand nombre parce que trop chère, une matière première onéreuse qui tire tous les coûts des produits manufacturés vers le haut. 

Les effets des chèques ou des ristournes sont annulés par la spéculation galopante. Et quand la pénurie guette du fait de la structuration inhérente au «marché», c’est au consommateur à qui on demande de faire preuve de sobriété… 

C’est toutes les failles d’un système qui sont mises à jour par la crise ambiante, un système mortifère incapable de se remettre en question, de se réformer, de se réguler de lui-même.

La CGT porte une autre vision de la société, dans laquelle l’énergie est avant tout un bien commun, dont l’exploitation doit être raisonnée et durable. La régularisation des prix ne peut se faire sans une maîtrise publique du secteur. Le tarif régulé du gaz en fut un bon exemple avant qu’il ne soit torpillé sur l’autel de la concurrence libre et non faussée. A bon entendeur…

 

22.042-Tract redistribution