Une législation améliorée, des syndicats pour contrôler
Salarié·e·s de la banque suisse UBS ou de la chambre de compensation internationale Clearstream basée au Luxembourg, ils et elles ont dénoncé de l’intérieur, au début des années 2000, des scandales financiers et des affaires de blanchiment et de fraudes fiscales qui ont défrayé la chronique. Ils et elles ont été licencié·e·s voire condamné·e·s par des juges pour atteinte au secret des affaires. Ils et elles sont au cœur du débat à propos du droit d’expression dans les entreprises et du statut de lanceur d’alerte. Après nos propos sur les chartes éthiques (https://ufictfnme.fr/reglement-interieur-charte-ethique-decrypter-pour-se-proteger/) et la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE), (https://ufictfnme.fr/droit-dexpression-salarie%c2%b7e%c2%b7s-rse-et-interet-general/) il nous a semblé logique de montrer l’importance de disposer de vecteurs d’alerte.
En France, deux lois récentes encadrent la protection du lanceur d’alerte : la loi Sapin 2 qui porte sur l’alerte en matière financière et fiscale et la loi sur le devoir de vigilance qui porte sur l’alerte en matière de respect des Droits humains. L’Union Générale des Ingénieur·e·s, Cadres, techniciens·nes CGT (UGICT) est partie prenante du mouvement syndicats-ONG qui milite pour l’adoption d’une directive européenne à laquelle le gouvernement s’oppose pourtant, estimant notamment que l’alerte externe ne peut être que l’exception.
Qui alerte ? Qui traite ? Qui contrôle ?
Aux termes des textes existants en France, les entreprises ont l’obligation de mettre en place un dispositif d’alerte garantissant l’anonymat du lanceur d’alerte. La loi protège le lanceur d’alerte contre toute sanction sauf en cas d’acte de malveillance. L’inconvénient majeur de la procédure est que l’alerte lancée en interne est traitée certes dans la plus complète confidentialité par la direction de l’entreprise … mais aussi dans la plus grande opacité. L’entreprise se protège : elle bénéficie de l’information et elle décide seule de son traitement.
La question de fond reste donc de savoir comment sera traitée l’alerte et sous le contrôle de qui ? Par exemple : n’y a-t-il pas risque de sanction larvée en interne pour le lanceur d’alerte lorsque le lièvre soulevé n’est aucunement pris en compte ; lorsque ce sont des lampistes qui sont attrapés mais pas ceux qui tirent sur les ficelles, comment les défendre ? Lorsqu’une sanction est prononcée à l’égard d’un responsable désigné mais sans traitement systémique du problème ; en cas d’élimination d’un responsable mis en cause par une alerte suscitée par la Direction elle-même. Dans ce cas précis, l’alerte ressemble fort à une dénonciation interne et à un système plutôt malsain…
Dès lors et, même si les nouvelles réglementations présentent d’indéniables vertus, il paraît nécessaire aux organisations syndicales d’exercer un droit de regard. Utiliser le canal des représentants syndicaux pour lancer une alerte offre une meilleure garantie pour le salarié ; ce qui ne l’empêche pas de déposer directement une alerte anonyme via les dispositifs mis en place par les directions « Ethique » des Groupes pour bénéficier de la protection s’il le souhaite.
La CGT revendique un comité de suivi des alertes afin que les représentants du personnel exercent un contrôle effectif quant au traitement apporté. Ces représentants seraient tenus à l’obligation de confidentialité, comme c’est le cas dans les procédures disciplinaires.
La CGT revendique un comité de suivi des alertes
L’Ufict-CGT préconise
- D’utiliser un représentant syndical pour lancer l’alerte en demandant un retour sur le traitement de sa demande ;
- Connaissant les personnes impliquées, l’organisation syndicale peut s’assurer, auprès des différentes parties (alerteur, personne(s) incriminée(s), hiérarchie, déontologue) de la réalité du problème ;
- Si l’organisation syndicale n’a pas de retour ou s’il y a un risque pour des salarié·e·s dans le traitement de l’alerte, elle peut passer par les élus en CSE, comités de groupe ou comités de suivi RSE voire alerter la justice et/ou la presse.