ENGIE : Suspension momentanée du projet « Trajectoire 2023 »

[Options 655 – Mars 2020 – p6]

Pour ne pas respecter le statut des IEG, Engie se retrouve aujourd’hui devant les tribunaux.

Si à la tribune de l’ONU Isabelle Kocher, ex directrice générale d’Engie, n’a jamais manqué d’évoquer la planète et « le soin à donner aux personnes », au siège social du groupe à la Défense les beaux discours ont laissé place à des actes précisément contraires. La casse sociale caractérise l’entreprise depuis de nombreuses années et particulièrement à la direction BtoC (Business to Consumer) livrée au féroce appétit du marché et de la concurrence décidée à Bruxelles et Bercy, sous l’oeil complice de la direction du groupe.

C’est dans ce contexte que la justice contraint Engie à geler son projet « Trajectoire 2023 », énième plan de restructuration visant à rabougrir encore un peu plus les sites de Lyon, Villeurbanne, Toulouse, Bagneux et Paris Montparnasse. En effet, en décembre 2019, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre (TGI) a suspendu leur fermeture programmée, en exigeant le respect de la PERS 212 qui précise qu’un emploi vacant doit être republié sur le site d’origine. En 2016 déjà, 561 emplois ont été supprimés, 4 Centres de Relation Clientèle (CRC) fermés et « une nouvelle cible organisationnelle définie ». Or, au 31/12/2019, cette cible était toujours hors de portée et 93 emplois non pourvus.

Dégraisser dans le portefeuille clientspour dégraisser dans les emplois

Le TGI ordonne donc à Engie de publier et de pourvoir ces emplois sur le périmètre de l’ancienne Direction des Opérations Relations Clients (DOREC) et de cesser de présenter aux IRP tout nouveau projet de restructuration. Une astreinte de 1 000 euros par emploi et par jour court depuis le 22 janvier 2020, de même qu’une astreinte de 5 000 euros par jour tant que l’organisation cible n’est pas publiée. Engie ayant fait appel de cette décision, une nouvelle audience est fixée au 22 avril 2020. La décision des juges ne sera connue que plusieurs semaines après.

L’inquiétude est de mise pour tou.te.s les salarié.e.s de la Direction des tarifs réglementés impacté.e.s par « Trajectoire 2023 », soit 566 personnes aujourd’hui (majoritairement des femmes compte tenu de la part des CRC dans l’effectif total), dont 30 % de cadres et 50 % d’agent.e.s de maîtrise. Avec ou sans répit provoqué par la justice, quel avenir pour ces personnels une fois les tarifs réglementés de vente (TRV) du gaz définitivement hors-jeu au 30 juin 2023 ? 

Annoncée dans la loi Energie Climat du 8 novembre 2019, la fin des TRV gaz devient une réalité et, depuis novembre 2019, ces contrats ne sont plus ouverts à la souscription. Or, au 2 février 2020, Engie compte encore 3,5 millions de clients en TRV gaz, dont 70 % ont plus de cinquante ans et perçoivent le plus souvent un revenu modeste. L’objectif fixé par la loi consiste à ramener ce nombre à un million. C’est ce dégraissage dans la clientèle qui met en péril la direction BtoC et que contrarie momentanément la décision du TGI de Nanterre.

Les propositions de reclassement que pourrait faire la direction du groupe relèvent du grand classique : congé de fin de carrière, congé mobilité pour celles et ceux qui développeraient un projet de création d’entreprise… Rien qui permette d’enrayer la perte des emplois, des qualifications et des compétences. Un trou noir pour les salarié.e.s que le statut des IEG protège encore de plans de licenciements massifs, mais qui disparaissent néanmoins du paysage année après année ; depuis 2012, environ 800 emplois en ont fait les frais.

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