Les managers des Industries Electriques et Gazières témoignent…

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Ils expriment leur ressenti vis-à-vis de leur métier, des libertés qu’ils ont ou qu’ils n’ont pas, de leurs objectifs, leurs difficultés…

Les avis sont partagés sur la liberté qu’ont ou n’ont pas les managers pour pratiquer l’encadrement dans leur équipe : « Le management dans l’entreprise est différent en fonction du manager N+1. Soit il vous laisse vous organiser comme vous le souhaitez, soit il vous impose votre feuille de route ». En revanche, ils sont plus unanimes sur leur charge de travail  : « A Enedis, nous avons une charge de travail importante, et le fait d’être manager de proximité nous oblige d’une part à connaître le métier de notre équipe, et d’autre part à assurer le rôle et les missions de manager. Autant dire que les journées sont longues… ».

« Je dis à la hiérarchie que les objectifs ne sont pas atteignables… sans le faire transpirer aux agents »

L’un des principaux facteurs de stress et de difficultés réside dans l’atteinte d’objectifs que beaucoup qualifient « d’inatteignables », alors : « Je fais avec les règles de l’entreprise, je cherche les marges de manœuvres à ma main et j’en joue le plus possible pour faire avancer le collectif en utilisant au mieux les forces de chacun ». Leur priorité est de faire de leur mieux pour répondre aux injonctions contradictoires, de remplir leurs objectifs, tout en préservant au mieux leur équipe : « Je garde la pression mais je ne la mets pas aux salariés ». « J’essaye d’atteindre les objectifs en mettant le moins de stress aux agents ». « Je me permets de dire à la hiérarchie que certains objectifs ne sont pas atteignables… mais je ne dois pas le faire transpirer face aux agents ».

Ils sont tous très critiques sur leur marge de manœuvre pour récompenser les agents  : « Ce qui ne me convient pas c’est mon absence de liberté pour récompenser mes collaborateurs. Ce n’est pas moi qui décide, c’est mon directeur. Mais comment récompenser ou non un collaborateur sans être proche de lui au quotidien ? ». « Il manque clairement des leviers de reconnaissance pour l’investissement des salariés, malgré les discours incantatoires de nos dirigeants, quand les budgets se réduisent à peau de chagrin, qu’il faut économiser sur tout… Car des objectifs ambitieux nécessitent de mettre en place un vrai plan de rémunération salariale (hors primes) ».

« Je travaille surtout sur les reconnaissances non-financières à ma main »

La politique salariale des entreprises qui abaisse le quota des avancements ne favorise pas la motivation des agents, alors certains composent, comme ce manager : « Je travaille surtout sur les reconnaissances non-financières à ma main : affectation d’activités transverses, prise de responsabilités, accompagnement à l’évolution professionnelle… »

Tous les managers rencontrés restent attachés à leur métier et à leur entreprise, malgré les difficultés, mais certains dénoncent le double discours de leur hiérarchie : « Prends soin de toi et remplis tes objectifs ». D’ailleurs la majorité d’entre eux dénoncent le fait que : « Les moyens ne sont pas en adéquation car il y a un manque d’effectifs par rapport à la charge de travail qui augmente, et cela, malgré les remontées de ma part » ou « Actuellement en sous-effectif, difficile de tenir les objectifs ». Un manager d’EDF regrette aussi que : « Les heures étant comptées je ne peux pas les envoyer en formation comme je le souhaiterais ».

« Pour atteindre les objectifs de demain il faudrait mettre les moyens dèsaujourd’hui ! »

Concernant l’avenir certains sont inquiets, notamment à Enedis : « A date, mes craintes sont surtout pour les objectifs des années à venir, qui ne sont pas encore fixés, mais dont on sait en deviner l’envergure. La transition énergétique apportant son lot d’activités supplémentaires, nous aurons besoin de nouveaux agents et surtout de les former dans les meilleures conditions possibles, afin de faire face à la vague de demain. Ce sont sur les apprentis et les nouveaux embauchés que reposeront l’atteinte de ces objectifs de demain, mais il faudrait mettre les moyens dès aujourd’hui ! ».

Au travers de ces interviews, une chose est certaine : les managers ne se sentent absolument pas associés aux choix stratégiques des entreprises  : « Je n’y suis pas du tout associé : c’est du domaine réservé aux directeurs. Il n’y a pas beaucoup de possibilité d’apporter des idées nouvelles. C’est très cloisonné ». Si certains le regrettent, d’autres en revanche estiment que ce n’est pas de leur ressort : « Moi, je suis là pour appliquer la stratégie de l’entreprise, pas pour la définir ».

« Il est difficile de manager à distance »

La généralisation du télétravail a particulièrement impacté les managers, notamment dans leur façon de gérer leur équipe, rendant parfois la tâche plus difficile : « Depuis la mise en place du travail à distance (TAD), j’ai pu me rendre compte que l’accompagnement des agents est totalement différent. En effet, le management à distance demande une attention particulière sur le fait de s’assurer que son interlocuteur a bien compris ce que vous lui avez expliqué ». « C’est un peu plus difficile car les salariés travaillent chez eux et on ne les a pas « sous la main ». « Il est difficile de manager à distance : comment déceler un agent en difficulté, la montée en compétences, faire un point informel sur des tâches précises… D’où la nécessité de conserver des jours sur site pour les temps informels et échanger physiquement avec l’équipe. Les nouveaux outils offrent, certes, de la souplesse mais ne remplacent pas les relations réelles du quotidien sur site ». « Nous avons l’impression d’avoir des services fantômes certains jours ».

Mais malgré ces difficultés, ils reconnaissent les bienfaits du télétravail pour eux et leur équipe : « Nous sentons que les salariés sont plus libérés en TAD, car ils sont dans leur milieu naturel, sans le stress du retard routier le matin ». « Les agents ont plus d’autonomie et cela renforce le lien de confiance mutuelle entre le manager et l’agent ». « L’autonomie des salariés a été accrue, ainsi qu’un meilleur équilibre pro-perso. Tout cela mis bout à bout a engendré des gains de performance que nous avons constatés ».

Tous ces interviews confirment que l’Ufict-CGT doit continuer à se préoccuper des managers en maintenant un lien régulier avec eux. C’est un enjeu majeur parce que les directions les considèrent comme le vecteur des transformations du travail des autres salariés. Bien qu’ils soient isolés face à des méthodes managériales qui répondent à des objectifs financiers, qu’ils soient très souvent enfermés dans l’obligation de s’adapter au risque d’être marginalisés, il faut donc recréer du collectif et construire des alternatives, avec eux, à partir de leur expertise. Cela devrait être facilité par la campagne « management collaboratif » lancée par l’Ufict…

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