L’injustifiable Hercule

En passe, peut-être, de trouver un accord avec la Commission européenne, le gouvernement semble vouloir accélérer le calendrier institutionnel et législatif pour boucler son projet Hercule. 

Malgré la mobilisation importante des salariés, et l’opposition de bon nombre d’élus, parlementaires et associations, nos gouvernants choisiraient encore une fois de céder à la pression des banques d’affaires et des intérêts privés, au détriment de l’intérêt général. 

 

Des arguments fallacieux pour justifier l’injustifiable 

L’argumentation serinée pour justifier la remise en cause du statut juridique et l’organisation d’EDF ne repose sur aucun élément tangible. Pour preuve : 

« La situation financière exigerait de réformer le Groupe par la mise en place du projet Hercule ». Etonnant argument au regard du résultat positif d’EDF qui donnera lieu au versement de 600 M€ de dividendes au titre de 2020 (en hausse de 25 % par rapport à 2019). Et ce, malgré une année plus que difficile pour le Groupe, en raison de la situation sanitaire, de ses conséquences – confinement, approvisionnements perturbés, reprogrammation des arrêts de tranches…- et de la fermeture programmée des deux tranches de Fessenheim. Tout cela démontre bien la solidité d’EDF. 

« La mise en place d’Hercule se justifierait par la nécessité d’accroître sa capacité d’investissement pour financer le grand carénage du nucléaire historique, l’augmentation des énergies renouvelables, et le nouveau nucléaire ». Pourtant, ouvrir EDF à des capitaux privés n’est certainement pas la meilleure solution. En effet, même si EDF est déjà endettée à 42 milliards d’euros, elle n’est pas une entreprise industrielle comme les autres : un investissement de type EPR aura une production de l’ordre du siècle ! EDF peut donc s’endetter bien au-delà d’une entreprise industrielle classique, comme cela a été le cas par le passé, d’autant que les taux de crédit sont bas, voir négatifs. Les ratios de dettes pour EDF doivent donc être ajustés sur le long terme et non sur le moyen terme, comme une entreprise industrielle traditionnelle dont une machine est obsolète au bout de 20 ans ! 

« Le découpage de l’entreprise serait la seule solution pour une révision de l’ARENH ». Si la situation financière du groupe nécessite de revoir la régulation du nucléaire pour financer les investissements nécessaires, rien ne justifie de séparer encore plus les activités de production, de transport, de distribution et de commercialisation. L’état français qui a tendance à sur-transposer les directives européennes, a les moyens de faire prévaloir l’intérêt national lorsqu’il en a la volonté. Les règles du marché s’arrêtent là où commence la volonté politique de l’Etat en charge de l’intérêt national. La France a su le faire pour que RTE demeure totalement public, contre l’avis de la Commission européenne. 

Des risques incontestables dans un EDF démantelé 

Si aucun argument tangible ne justifie le projet Hercule, les risques qu’il engendre sont multiples. L’un des premiers est celui de la désoptimisation d’EDF, avec différentes entités en concurrence, certaines publiques, d’autres privées, uniquement reliées entre elles par des bilans d’ordre financier (logique de holding). Une désoptimisation aussi bien technique qu’économique entre deux productions pilotables : nucléaire et hydraulique ! 

A brève échéance ce démantèlement conduirait à une entité publique gérant des actifs « échoués » (le nucléaire), et une entité privée (distribution, commercialisation, services, renouvelables) dont le cash ne profiterait pas à l’entité publique, mais aux actionnaires privés (qui passeraient certainement majoritaires à terme). 

D’autre part, la privatisation d’Enedis, via celle d’EDF vert, renforcerait considérablement la pression sur le monopole des concessions. Cela pourrait conduire à la disparition du monopole et à la remise en cause de la péréquation tarifaire, avec à la clé une baisse du niveau des investissements et de l’entretien des réseaux de distribution, ce qui est le fondement même des cahiers des charges des concessions. Quant à la promesse de sécuriser par la loi ces éléments, elle n’est en rien rassurante. L’histoire a déjà montré que ce qui est prévu par une loi peut être défait par une autre loi, et dans un futur plus ou moins proche. 

 

Le jour efface les promesses de la nuit 

Employeurs et gouvernement tentent de rassurer en affirmant que les craintes des salariés sont infondées. Et comme ils l’avaient fait lors de l’ouverture à la concurrence et du changement de statut d’EDF, ils affirment que l’impact sur les salariés, l’emploi, le service public… sera nul. Ils promettent également, comme ils l’avaient fait pour Gaz de France, que JAMAIS l’entité verte ne sera privatisée… L’histoire récente nous apprend ce que valent leurs promesses… ! 

Que l’accélération du calendrier soit un coup de bluff ou pas de la part du gouvernement, l’ensemble des salariés doit prendre la mesure des risques que comporterait la mise en oeuvre du projet Hercule. 

L’élargissement de la mobilisation est un atout essentiel pour éviter Hercule. 

 

L’Ufict-CGT appelle les salarié.e.s à se mobiliser le jeudi 25 mars et le jeudi 8 avril, à l’occasion du 75ème anniversaire de la loi de nationalisation du gaz et de l’électricité, pour mettre fin à ce projet, bâtir un service public de l’Energie de qualité et gagner enfin un bilan de la déréglementation du secteur. 

 

Pour télécharger le tract modifiable cliquez ici

Réagir

Votre mail ne sera pas publié.