Un Héritage et un projet

[Options 649 – septembre 2019 – p 14] Suite à l’intervention très appréciée du Président de l’Institut d’Histoire Sociale Mines-Energie, François Duteil, lors du Congrès Ufict à Gréoux, Options a proposé à l’IHSME* de revenir sur des aspects importants de l’histoire du syndicalisme Cadre. Cela fera donc l’objet d’une rubrique régulière dans les prochains Options.

L ‘étude de l’histoire nous enseigne que ce sont les femmes et les hommes qui font leur vie. En effet, il n’y a rien de pré-déterminé dans un sens ou dans un autre, y compris sur tout ce qui touche à la vie syndicale, le devenir d’une organisation. Mais malgré votre volonté et votre détermination, vous ne faites pas tout ce que vous voulez, dans des circonstances que vous auriez choisies.

Raconter le passé, y compris celui du syndicalisme spécifique, ne vise pas à en reproduire mécaniquement la forme, mais à produire du nouveau.

On n’interprète pas l’histoire, on la fait

Depuis 1937, l’expérience vécue nous a appris que le temps historique n’est pas un trajet nous conduisant nécessairement à son but. Cela ne saurait donc se réduire à un processus mécanique teinté d’une quelconque fatalité, négative ou positive.

Ce qui a été décidé en juin 1937, est à la fois un héritage et un projet et relève de notre volonté collective.

Nous avons la chance qu’en 1937, tirant des enseignements des luttes de 1936 et du Front Populaire, des militants ouvriers avec l’aide de quelques ingénieurs aient créé le GNC, qui est devenu aujourd’hui l’Ufict.

Un choix politique et stratégique

Rappelons ce que disait Marcel Paul à l’issue du congrès fédéral de juin 1937 : « Dans les batailles revendicatives de 1936, l’expérience montrait :

  • Qu’il n’était plus possible de se figer dans la lutte isolée, exploitation par exploitation, la concentration économique s’accélérait, il fallait créer un front du personnel.
  • Que le rôle concret des cadres dans la production était en train de changer, du fait du développement des techniques, et que les batailles ne pouvaient être menées qu’en solidarisant le personnel ouvrier et les cadres et ingénieurs contre les directions des compagnies. Il s’agissait donc d’aider les cadres à s’organiser en toute indépendance, et d’abord en dehors de toute influence patronale il fallait concevoir et réaliser un nouveau groupement, indépendant organiquement du personnel d’exécution, mais appelé à agir avec l’organisation syndicale de ce dernier, pour le succès d’objectifs définis en commun ».

Le syndicalisme spécifique, dans la proximité et la permanence, a été un gage d’efficacité, de démocratie et d’unité

Ce choix politique et stratégique est aussi un choix d’orientation ; les questions de structures, qui souvent occultent le débat de fond, ne sont que la conséquence de ces choix. Et avec le recul, ce n’est pas un hasard si, en 1937, dans un même congrès s’élabore le concept de statut national, la revendication de la nationalisation et la mise en place d’un syndicalisme spécifique confédéré. L’histoire a montré et démontré que notre conception du syndicalisme spécifique, quand nous avons su le déployer dans la proximité et la permanence, a été un gage d’efficacité, de démocratie et d’unité. Elle nous rappelle également que notre démarche revendicative et nos valeurs sont indissociables.

Nous ne confondons pas catégoriel et spécifique et notre démarche démocratique doit conduire à créer les conditions de l’intervention convergente de chaque individu, à l’opposé de l’individualisme, même si l’individu, avec sa personnalité, est une réalité historique.

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