[Options n°645 – mars 2019] Combien d’entre nous se sont interrogé·e·s sur les stratégies de nos entreprises ? L’impression de ne pas tout comprendre des logiques du libéralisme et de la mondialisation…
Des interrogations d’autant plus légitimes si on est convaincu que l’énergie et au premier chef, l’électricité et le gaz, sont devenus des biens fondamentaux, indispensables à une vie décente dans notre monde moderne.
Le livre, l’étude pourrait-on dire, d’Aurélien Bernier « Les voleurs d’énergie », décortique les stratégies d’accaparement et de privatisation de l’électricité, du gaz et du pétrole au cours du temps, de l’ère préindustrielle à nos jours.
Citations à l’appui des dirigeants de l’époque, on y apprend que la province canadienne de l’Ontario fût la première en 1906 à nationaliser l’électricité, tant l’enrichissement des industriels qui s’étaient appropriés la production et la distribution, s’était honteusement réalisé au détriment de l’intérêt commun. Cette nationalisation fût suivie par beaucoup d’autres, notamment dans les pays capitalistes les plus développés. Des nationalisations confortées par les deux guerres mondiales qui mirent en évidence l’importance stratégique de l’énergie dans les conflits armés. En France, ce n’est qu’après la libération, le 8 avril 1946 que la loi de nationalisation est votée après d’âpres batailles législatives.
Mais les capitalistes n’en resteront pas là puisque, dans le monde entier, ils déploieront leurs stratégies de privatisation pour tout reconquérir. Le marché de l’énergie est devenu un des plus captifs du monde, c’est ce qui attise sans doute un tel appétit de profits.
Le fait le plus éclairant, sans doute, sur la période actuelle, ce sont toutes les manœuvres pour mettre en bourse les émissions carbone, les certificats d’économie d’énergie, l’électricité « verte »… dans l’espoir, pas encore tout à fait atteint, de réaliser des sur-profits sur les aspirations écologistes des populations.
Ce livre traite de sujets économiques qui peuvent paraître ardus, dans un domaine très technique et technologique. L’auteur arrive pourtant, avec une écriture simple et une construction très logique et documentée de son propos, à rendre le sujet à la fois accessible à tous, vivant et très instructif.
Cette lecture est donc fortement recommandée pour tout militant soucieux de comprendre, d’anticiper et combattre les stratégies à l’œuvre dans le monde de l’énergie.