Gagner un véritable droit à la déconnexion

Dès 2014, la CGT a porté le principe d’un droit à la déconnexion, cette idée novatrice et souvent critiquée s’est largement démocratisée. A tel point qu’aujourd’hui ce droit est plébiscité par une majorité de salarié·e·s. Pourtant, son application tarde à se concrétiser réellement dans les entreprises.

Le contexte actuel, remet sur le devant de la scène le télétravail et son corollaire, le droit à la déconnexion. En cours de renégociation dans nos entreprises, cela en fait un enjeu d’actualité essentiel. Le télétravail en mode dégradé vécu depuis un an, et toutes ses conséquences, ont encore renforcé le besoin absolu de mettre en œuvre ce droit pour tous les salarié·e·s, et a fortiori pour les cadres au forfait-jour.

 

QUE DIT LA LOI ?

« Le droit à la déconnexion est le droit pour un salarié de ne pas être en permanence joignable dans un cadre professionnel lui assurant ainsi la possibilité de se couper temporairement des outils numériques. Instauré par la loi Travail d’août 2016, le droit à la déconnexion vise à assurer le respect des temps de repos et des congés des salarié·e·s ainsi que de leur vie personnelle et familiale. Il concerne notamment les salarié·e·s au forfait jour ou en télétravail, pour lesquels les horaires de travail et de repos ne sont pas toujours clairement délimités. »

Entré en vigueur dans le droit du travail français au 1er janvier 2017, il s’applique à tous les salarié·e·s et impose à l’employeur de « mettre en place des instruments de régulation de l’outil numérique ». A défaut de négociation, l’employeur doit tout de même mettre en œuvre ce droit, sous la forme d’une charte unilatérale de sensibilisation à l’usage des outils numériques. Un bien faible rempart pour les salarié·e·s  concerné·e·s

 

ET DANS LES FAITS ?

Excepté pour quelques très rares entreprises, les accords en vigueur ne sont aucunement contraignants pour les employeurs. Les entreprises de l’énergie n’échappent pas à la règle, et les accords se limitent à des engagements de « sensibilisation » des salarié·e·s aux usages des outils numériques : « renseigner son agenda, signaler ses absences, paramétrer ses notifications, gérer ses priorités …», actions qui font l’objet d’expérimentations et qui relèvent plus de la gestion de « l’obésité numérique » que d’un véritable droit à déconnecter.

Le changement culturel à rechercher n’est pas tant d’apprendre à mieux gérer ses mails mais d’éviter le « présentéisme numérique » et donc les sollicitations à toute heure, qu’elles soient urgentes ou pas.

Aujourd’hui les employeurs inversent le débat et font reposer l’entière responsabilité de la déconnexion sur le·la salarié.e.Pourtant ce n’est pas par plaisir ou par envie qu’ils·elles se connectent le soir, le week-end ou pendant leurs congés. Il s’agit bien d’un problème d’organisation du travail et de charge de travail mal calibrées. Ceci est bien du ressort de l’employeur qui a la responsabilité de garantir la santé physique et psychologique de ses salarié·e·s. Ne nous trompons pas de débat… C’est d’accords ambitieux en la matière et « d’obligation » de déconnexion dont nous avons besoin.

 

UN DROIT LARGEMENT REVENDIQUE

L’aspiration au droit à la déconnexion est de plus en plus forte en France. Le baromètre annuel de l’UGICT (la CGT confédérale des Ingénieurs, Cadres et Techniciens), réalisé par ViaVoice montre que cette revendication ne cesse de progresser : aujourd’hui 69% des salarié.es interrogé.es, souhaitent disposer d’un réel droit à la déconnexion (contre 56% en 2016). Hors crise sanitaire ou situation exceptionnelle, 76 % des cadres en France utilisent les technologies d’information et de communication sur leur temps personnel pour des raisons professionnelles.

De plus, 75 % des cadres estiment que les pratiques de télétravail en France ne protègent pas des durées excessives de travail et ne garantissent pas un droit à la déconnexion.

Sans surprise, au regard du temps de travail réel élevé pour bon nombre de salarié·e·s, l’aspiration à un meilleur équilibre vie privée / vie professionnelle arrive largement en tête des préoccupations des cadres (64 %), devant le salaire (52 %) et le sens du travail (49 %).

 

L’UFICT-CGT PESERA DANS LES NEGOCIATIONS

Le temps de travail non identifié augmente et le travail réalisé au domicile, dans les lieux tiers, ou dans les transports n’est ni reconnu, ni comptabilisé. Ce temps dépasse très souvent la réglementation et les limites horaires imposées par la loi. En parallèle, il est aussi clairement démontré que les salarié·e·s ont été plus « performants » de 20% en 2020,  un symptôme évident de la densification du travail dans le cadre du travail à distance…

L’employeur a une obligation de contrôle effectif du temps de travail. Cela s’impose d’autant plus que les charges de travail sont en général très largement sous-évaluées. Conséquence : de très nombreuses heures ne sont pas rémunérées, ce qui pose sérieusement la question de la mesure et du contrôle du temps réellement travaillé. Pourtant les employeurs éludent cette question et ne remplissent pas cette obligation de mesure et ce n’est pas leur intérêt de le faire !

Après l’invalidation par la justice de nombreux accords de branche sur le forfait jour insuffisamment encadré, l’Ufict-CGT continuera à agir au plan juridique si cela s’avère nécessaire. Pour autant, le débat est encore parfois difficile avec ceux qui « souhaitent travailler quand ils le veulent ». Pour l’Ufict-CGT, il ne s’agit pas de s’opposer aux nouvelles technologies, mais de permettre aux ingénieurs, cadres et techniciens de maîtriser leur temps de travail.

C’est donc en termes de charge de travail et de santé –une obligation légale de l’employeur – qu’il est temps de poser le débat.

Comment poser des limites à son supérieur hiérarchique qui vous sollicite en permanence, sans être stigmatisé ? Comment se déconnecter sereinement en ayant le sentiment d’inachevé ou en sachant que le retour de congés sera une punition tant la boite mail sera saturée ?

 

Il est donc temps d’avancer et de porter des propositions ambitieuses.

– Faire établir un bilan des temps de travail, volumes et amplitudes de connexion au Système Informatique.
– Mesurer la charge de travail effective sans la renvoyer à la seule responsabilité du manager et gréer les équipes en conséquence
– Créer au sein des équipes des systèmes de binôme ou de back up
– Organiser le stockage automatique des mails en période de congés ou le week-end.
– Mettre en place des fenêtres d’alerte à l’agent s’il envoie un mail au-delà d’une certaine heure
– Faire inscrire dans les accords un droit de recours du salarié pour acter de la responsabilité de l’employeur

Garantir la santé au travail nécessite un meilleur équilibre vie privée / vie professionnelle, le respect des temps de travail et de repos. Le·la salarié·e ne peut et ne doit pas être rendu.eresponsable d’une potentielle « mauvaise gestion » de ses temps.

Il est plus que temps que les employeurs assument les responsabilités qui sont les leurs.

 

Pour télécharger le tract modifiable cliquez ici

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